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 Dossier - Avril / Mai 2011

Pompes à chaleur : le rebond


David BONNETEdito

"Pompes à chaleur : se substituer ou se combiner avec d’autres sources de chaleur ?"

Les PAC hautes températures et les PAC hybrides sont deux évolutions des pompes à chaleur traditionnelles mais qui procèdent de démarches différentes. Alors que les secondes correspondent à un certain stade de maturation du marché, les premières ne sont que l’extension du marché qui se développe depuis des années. Leur finalité est de se substituer aux chaudières. Il est permis de s’interroger sur la pertinence, pour ce faire, de cette course à la haute température (80°C et plus) et surtout sur son réel besoin.

En existant, du fait de l’équipement du parc ancien en radiateurs plutôt largement dimensionnés et surtout après un passage préalable par une remise à niveau du bâti en termes d’isolation, il serait très surprenant que le besoin en haute température représente une part majeure du marché.

Et ce d’autant plus que faire fonctionner une PAC en haute température n’est pas la meilleure façon d’améliorer son COP. Quand on met en perspective les contenus marginaux en CO2 du KWh aux basses températures extérieures et les faiblesses des réseaux de distribution, il est permis de s’interroger sur le bien fondé d’une trop forte promotion de la substitution « pure et dure » sans pour autant condamner cette solution qui correspond à un pan de marché.

À côté de cela, les pompes à chaleur hybrides traduisent un certain stade de maturité. Après une phase de développement où on pensait et disait que chaque énergie et chaque solution EnR était la seule qui vaille et où les fabricants se sont concentrés sur leur savoir-faire, nous sommes aujourd’hui dans une phase de prise de conscience des réalités et de cette désormais incontournable mixité énergétique. On s’aperçoit qu’il n’y a pas de salut dans une seule et unique solution énergétique. L’avenir est à la combinaison des solutions : PAC et solaire thermique ou photovoltaïque, PAC et chaudière par exemple. La relève de chaudière apparaît clairement, à l’heure actuelle, comme une réponse pertinente parce qu’elle permet justement cette mixité énergétique.

Plutôt que de laisser le marché faire ses courses et acheter une PAC d’un côté, une chaudière de l’autre et une « poignée » d’accessoires (hydraulique et régulation), les industriels ont tout intérêt à proposer des solutions 2 en 1, prêtes à installer.

Sans être grand sorcier, on peut même prédire qu’il y aura des rapprochements entre grands groupes, que des savoir-faire seront partagés. Dans les mois et années à venir, on verra de plus en plus de solutions hybrides qui feront intervenir deux, voire trois, sources d’énergies avec une intelligence embarquée qui permettra de choisir à chaque instant l’énergie la plus pertinente en termes de performance, de disponibilité et de coût. C’est cette intelligence embarquée qui sera l’un des plus importants facteurs des développements à venir.

 

David Bonnet
Président de l’AFPAC

 


Pompes à chaleur : le rebond


Les PAC se mélangent aux énergies, fossiles ou nouvelles, pour composer des systèmes hybrides permettant de produire de la chaleur, pour le chauffage et/ou l’eau chaude sanitaire, au meilleur coût. Cette évolution des pompes à chaleur est dictée par la réglementation et par un marché qui a été difficile ces dernières années. Petit tour d’horizon des solutions des fabricants.

 

Saunier Duval Genia

À l’heure de la RT2012, des labels BBC et des économies d’énergie, c’est le mélange des modes de production de chaleur qui semble avoir le vent en poupe. Sur les salons Eneo et ISH, on pouvait ainsi voir au fil des stands des nouveautés qui allient plusieurs énergies : énergies fossiles et ENR ou ENR entre elles. Les PAC, dont le marché a subi une chute vertigineuse en 2009 et 2010, ont peut-être là une voie de développement sur laquelle s’engager pour proposer une solution de chauffage performante et économique qui retrouvera les faveurs de la clientèle. « Nous sommes passés d’une période, où on vendait une PAC parce qu’on vendait du crédit d’impôt, à une autre où les gens ont des budgets plus limités : ils réfléchissent, veulent faire le bon choix et ont une réflexion à long terme », explique Nicolas Legros, chef de produit PAC et systèmes hybrides de Saunier Duval.
Si les PAC en relève de chaudière sont au catalogue de nombreux fabricants (Précy d’Auer, Duolis Inverter ou Yuna de Ciat, TeamAO de Frisquet, Genia Hybride Universel de Saunier Duval ne sont que quelques exemples), des solutions complètes 2 en 1 commencent à apparaître, qui allient chaudières et PAC, ou encore PAC et solaire en un ensemble complet, prêt à poser. « Aujourd’hui, chaque constructeur montre qu’il est capable d’associer tout à tout. Le défi de demain est de le faire à des prix abordables », commente Sébastien Guiscriff, chef de produit de Chaffoteaux.

 

Gaz et PAC : une bonne association
Ils sont notamment trois fabricants de chaudières à travailler sur l’association d’une chaudière gaz à condensation et d’une PAC : Chaffoteaux avec Talia Green Hybrid, Saunier Duval avec Genia Hybrid Compact et, d’ici la fin de l’année, ELM Leblanc, avec un système monobloc.
« Au départ, Saunier Duval est spécialisé dans le chauffage. Il est donc intéressant pour nous de proposer un système qui complète la chaudière et conçu dans un esprit de facilité d’installation et de configuration. Cela nous permet de continuer à nous adresser à nos clients historiques », explique Nicolas Legros.
Même philosophie chez Chaffoteaux : « Pour notre produit hybride, nous avons utilisé la plateforme de chaudière Galileos que nous avons adaptée pour la faire fonctionner avec une solution bibloc. Le module hydraulique et la régulation sont intégrés dans la chaudière. Les installateurs qui connaissent nos chaudières sont donc capables de faire le SAV sur ce produit », commente Sébastien Guiscriff. Que les modèles soient monobloc ou en deux éléments, les fabricants recherchent à faire un produit simple à installer, déjà raccordé, qui ne nécessite pas une certification de frigoriste pour la mise en place et qui est simple à entretenir.
Les installateurs seront donc en partie en terrain connu. Et les clients également rassurés : l’installation d’une chaudière est un bon argument de vente, une manière de leur garantir un chauffage en toute saison, même quand il fait très froid et que les performances des PAC sont moindres ; ou en cas de panne d’un des deux générateurs, le second prenant alors le relais.

 

 


La haute température, une autre voie de développement
RotexAlors que les PAC, seules ou avec une ENR, se destinent plutôt au neuf, en particulier pour les maisons BBC, les PAC haute température trouvent leur intérêt en remplacement de chaudière dans l’existant, avec des émetteurs tels que les radiateurs. Si David Bonnet, président de l’Afpac, se pose des questions sur la réelle légitimité de ces PAC, ce n’est pas le cas des fabricants. « Je ne pense pas que cela soit un marché de niche car cela représente 30 % des ventes. On s’attend à des demandes importantes pour ce marché, il y aura un socle de quelques milliers de pièces », estime Johnny Garattoni, chef de groupe PAC et climatisation d’Atlantic. Le modèle Alfao S Excellia, avec ou sans ECS, du fabricant utilise une technologie de compresseur twin rotary à réinjection liquide en phase de compression. Il est utilisé de plus en plus par les fabricants « car il est très efficace à sollicitation partielle, souligne Johnny Garattoni. Il permet de bonifier la technologie inverter en maintenant la température du compresseur, évitant ainsi qu’il surchauffe et en offrant donc la possibilité de le solliciter plus longtemps ».
La technologie du double compresseur se retrouve sur le modèle HPSUhitemp de Rotex France, ce qui permet « d’atteindre une température de sortie d’eau de 80°C, même par -15°C à l’extérieur et sans l’appoint d’une résistance électrique », explique Marc Hattermann.
Ou encore le modèle PAC TH d’Airwell, qui assure des performances identiques à -7°C et +7°C, les modèles WPL 33 HP de Stiebel Eltron ou Altherma de Daikin.



Produire la chaleur au meilleur prix
ChaffoteauxAu niveau fonctionnement, le principe à chaque fois est de générer la chaleur de la façon la plus économique possible. C’est donc la PAC qui fonctionne en priorité, tant que son rendement réel, calculé à un instant précis, reste supérieur à celui de la chaudière. Par exemple, le système de Saunier Duval effectue des tests réguliers pour savoir si la température de consigne peut être atteinte rapidement. Si ce n’est pas le cas, la chaudière entre en action. Et si les relevés de températures extérieures indiquent un changement, de nouveaux tests sont opérés. « Le but du jeu est d’atteindre la température de consigne le plus vite possible, au meilleur prix. Le système fonctionne avec le coût de l’énergie, entré par l’installateur, et, un système d’abaques ; la régulation détermine quel est le générateur le plus intéressant », précise Nicolas Legros


Même esprit pour la Talia Green Hybrid de Chaffoteaux, avec un paramètre constant préréglé en usine, correspondant à un rapport moyen entre les performances du gaz et celles de l’électricité, ou un paramètre à régler par l’installateur en fonction du prix réel des énergies. Quand le COP de la pompe à chaleur est inférieur à ce paramètre, seule la chaudière fonctionne. Au-dessus, la PAC prend le relais. Le seul impératif est de remettre à jour régulièrement les données du système, ce qui peut être fait par exemple au moment de l’entretien annuel de la chaudière.
Deux marchés sont visés par des produits hybrides : d’une part la maison individuelle neuve, en BBC, « avec une solution qui est moins chère que le solaire », précise Sébastien Guiscriff. Mais aussi pour la rénovation, en remplacement d’une chaudière, pour un circuit en basse température avec plancher chauffant et radiateurs faible température, pour Chaffoteaux. Ces produits sont plus chers qu’une chaudière ou qu’une PAC séparées, mais moins que l’ensemble des deux. « On parle d’investissement raisonné pour ce type de système » souligne Nicolas Legros. La rentabilité dépend en effet de nombreux paramètres : « température extérieure, température de consigne, isolation, altitude, paramétrage », énumère Sébastien Guiscriff. Et dans certains cas, un système hybride n’est pas forcément nécessaire si la chaudière est performante et bien isolée. « Nous formons beaucoup les installateurs à dimensionner en fonction de l’installation existante et du générateur. Il faut que ce soit adapté en fonction du comportement de l’utilisateur, c’est pour cela que nous avons une démarche axée sur la formation. C’est ce qui permettra à la PAC de revenir à une meilleure image de marque », commente Nicolas Legros.

 

 

Fioul et PAC pour la rénovation
Le même type de système existe aussi avec une chaudière fioul : c’est l’Alfea Hybrid Duo d’Atlantic. Si l’énergie fossile change, les arguments restent les mêmes que pour les systèmes gaz/PAC : « l’intérêt est de faire des économies grâce à la PAC et d’avoir la sécurité d’une chaudière, détaille Claire Lentgen, chef de groupe des produits domestiques d’Atlantic. Le retour sur investissement est de 10 ans. C’est donc une solution à moyen terme et nous ciblons les propriétaires de maison. » Fonctionnant à haute température, « à cause de la chaudière », explique Claire Lentgen, ce système peut être installé dans une installation fioul déjà existante.
Le concept hybride fait partie de la stratégie à venir du fabricant, qui réfléchit des petites PAC associées à une autre énergie pour le neuf, sans ECS : gaz+PAC, solaire+PAC.

 


La zéolithe, une pierre qui intéresse plusieurs constructeurs
ViessmannIls sont au moins deux fabricants à se pencher sur la zéolithe, une pierre aux propriétés particulières d’adsorption de l’eau : Vaillant avec ZeoTherm et Viessmann avec un combiné compact zéolithe.
VaillantLe fonctionnement se fait en deux temps, dans une PAC sous vide : l’eau est réchauffée dans le bas de la pompe et vient se lier à la zéolithe, qui est microporeuse. La vapeur d’eau se condense et génère une chaleur d’adsorption qui peut être utilisée pour chauffer l’habitation. Puis une fois la zéolithe saturée et incapable de lier davantage d’eau, le minéral est réchauffé, ce qui a pour effet de libérer l’eau stockée dans la zéolithe sous forme de vapeur d’eau (désorption). Cette vapeur est ensuite acheminée vers la partie inférieure de la pompe à chaleur, où elle se condense et dégage à nouveau de la chaleur. Après une période de refroidissement, cette boucle de chauffage peut recommencer.


 

PAC et solaire
Cette dernière solution, qui combine deux ENR, est déjà proposée sur le marché par plusieurs fabricants. « Nous ne misons pas sur un produit individuel, mais sur son application en système. D’où la création il y a deux ans de notre gamme PAC-solaire HPSU », explique Marc Hattermann, responsable des ventes Nord de Rotex France. La gamme a été complétée dernièrement par un modèle compact qui réunit en un seul corps module intérieur et accumulateur solaire d’ECS.
Présentée à Eneo, la LWZ de Stiebel Eltron regroupe 4 fonctions en une machine : chauffage, refroidissement, eau chaude sanitaire et VMC, grâce à l’intégration d’une PAC air/eau, de deux panneaux solaires et d’une VMC double flux. « Elle a des performances proches de la géothermie », explique Franck Foureau, responsable prescription. Destinée au marché de la maison individuelle, plutôt type BBC, elle peut alimenter un circuit de radiateurs ou un plancher chauffant.
RothLe système hybride Solargeo de Roth utilise lui aussi une PAC mais géothermique, eau glycolée-eau, associée à des capteurs solaires. Une station de contrôle terrestre et un module énergie-logique vient compléter le tout. La partie solaire fournit jusqu’à 25% de l’énergie pour le chauffage et l’eau chaude. S’il y en a, l’excédent d’énergie est dirigé vers la station de contrôle pour servir à augmenter le potentiel énergétique utilisable de la pompe à chaleur ainsi que pour régénérer la terre. L’évolution suivante est le couplage avec un panneau photovoltaïque pour alimenter la PAC et assurer ainsi une certaine indépendance énergétique du système.

 

Zéolithe associée au gaz ou au solaire
Vaillant a choisi d’associer la pompe à chaleur à adsorption au gaz avec trois panneaux solaires plats et un préparateur sanitaire solaire. Les panneaux solaires servent d’une part à réchauffer l’eau pour la transformer en vapeur lors de la phase d’adsorption. Cela se fait sous vide, et l’eau bout donc à une très faible température (4 °C) et n’exige que très peu d’énergie solaire. Les panneaux solaires et le préparateur sanitaire solaire sont par ailleurs utilisés aussi pour la production d’eau chaude. Il s’agit d’une solution qui convient pour du neuf ou pour un logement rénové et bien isolé.
Le combiné compact de Viessmann associe quant à lui, sous un même habillage, une chaudière gaz à condensation de 16 kW et une pompe à chaleur à adsorption de 1,6 à 4,8 kW basée sur la zéolithe. Son fonctionnement est calculé pour optimiser le rendement : le module pompe à chaleur couvre les besoins de base du chauffage du bâtiment en utilisant la chaleur du milieu naturel. La chaudière gaz à condensation, quant à elle, ne couvre que les besoins de pointe.

Corinne Montculier

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