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 Solution technique

Comptage des énergies et des fluides : être conscient des enjeux


Le choix d’une solution de comptage doit répondre à un cahier des charges « éclairé », avec la conscience des enjeux à terme, notamment en matière de gestion des données. En d’autres termes, rien ne sert de compter si personne ne tire profit des informations collectées.

 

Le comptage de l’énergie et des fluides revêt en général un caractère hautement stratégique dans le secteur du bâtiment. Qu’il s’agisse de l’habitat individuel, collectif ou bien encore des bâtiments tertiaires, cet aspect fondamental du vaste chantier que représente la performance énergétique mobilise beaucoup d’acteurs : les énergéticiens, les gestionnaires de parcs, mais aussi des acteurs des télécommunications.

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Facturation : nouvelles générations de compteurs
Pour les fournisseurs d’énergie et de fluides, les enjeux sont colossaux. En témoignent les rebondissements autour du futur compteur électrique Linky d’ErDF, qui a reçu en août dernier l’accord du gouvernement pour déployer sa nouvelle génération de compteurs. Les 35 millions de compteurs actuels seront remplacés d’ici à 2020 par le modèle Linky.
En parallèle, début août 2013, les ministres chargés de l’Énergie et de l’Économie ont donné leur accord au déploiement du compteur communicant Gazpar de GrDF.
Ces décisions constituent une première étape vers la mise en place généralisée des compteurs communicants qui ont vocation à ouvrir de nouvelles opportunités telles que la connaissance renforcée des consommations qui donnera les moyens aux consommateurs d’optimiser leur comportement, et aux fournisseurs d’offrir des services favorisant la maîtrise de l’énergie. C’est aussi la perspective de réseaux « intelligents », où productions et consommations pourront être pilotées en temps réel.



RT 2012 : exemples de systèmes de comptage
Dans la fiche d’application RT 2012 du 30 mai 2013, trois modèles, donnés à titre d’exemples et ne constituant pas une liste exhaustive des possibilités, illustrent les exigences réglementaires :
• Le système 1 détermine, à partir de la relève automatique des consommations au niveau des compteurs une répartition de la consommation par poste. Ils le font éventuellement aussi à partir des informations de consommation issues des équipements consommant de l’énergie et de leur transfert automatique à un ordinateur (personnel, intégré à l’équipement ou distant).
• Le système 2 consiste à mettre à disposition de l’occupant du logement un logiciel répartissant la consommation par poste à partir de la consommation globale fournie par le(s) compteur(s) d’énergie, et éventuellement des informations de consommation issues des équipements consommant de l’énergie. Les consommations sont relevées et saisies manuellement par l’utilisateur dans le logiciel, a minima mensuellement, afin de déterminer une répartition des consommations par poste.
• Le système 3 détermine une répartition de la consommation par poste, à partir de la relève automatique des consommations au niveau des compteurs et sous-compteurs, selon le niveau de détails retenu, puis de leur transfert automatique à un ordinateur.




Sous-comptage :  la RT 2012 encore timide
Jusqu’alors déployée sur les sites industriels ou dans le grand tertiaire, la notion de sous-comptage par usage est apparue dans la RT 2012 afin de faire prendre conscience aux exploitants (occupants) de la façon dont l’énergie était consommée. Objectif : agir usage par usage et constater les effets des actions entreprises, qu’il s’agisse de la mise en pratique d’écogestes (le simple bon sens) ou d’investissements visant à réduire les consommations.
La RT 2012 précisait initialement dans son article 23 (arrêté du 26 octobre 2010) : « Les maisons individuelles ou accolées ainsi que les bâtiments ou parties de bâtiments collectifs d’habitation sont équipés de systèmes permettant de mesurer ou d’estimer la consommation d’énergie de chaque logement, (…/…). » L’application concrète est longtemps restée floue… et chacun a bien voulu y lire ce qui l’arrangeait : estimation ou mesure ? D’où la parution, le 30 mai 2013, d’une fiche d’application émanant des ministères concernés, du CSTB et de l’Ademe. Le document décrit de façon non exhaustive quelques systèmes permettant de répondre aux exigences initiales. Mais, fort de ces précisions, le texte reste timide… Car, concernant les bâtiments collectifs d’habitation, on peut y lire : « En cas de production collective de chauffage et/ou d’eau chaude sanitaire, la consommation d’énergie mensuelle par poste de chaque logement fournie à l’occupant peut être estimée selon une clé de répartition définie par le maître d’ouvrage (exemples de répartition : prorata des surfaces habitables, tantièmes, répartition des postes chauffage et eau chaude sanitaire issue de l’étude thermique). » Autre exemple qui prouve l’immaturité en matière d’application : « Le “système” s’appuie sur les consommations affichées au(x) compteur(s) d’énergie, et éventuellement sur des informations de consommation issues des équipements consommant de l’énergie. Les consommations sont relevées et saisies manuellement par l’utilisateur dans le logiciel informatique, a minima mensuellement, afin de déterminer une répartition des consommations par poste. » L’exercice reste artificiel et risque de mobiliser peu de personnes. Le vrai sous-comptage devrait voir le jour avec la RT 2020 qui, vraisemblablement, se nommera RBR 2020 comme « Réglementation bâtiment responsable ».

Des solutions apparaissent  sur le marché
Les avancées de la RT 2012 ont eu pour effet l’arrivée sur le marché de solutions de sous-comptage complètes. En effet, jusqu’à présent, il existait des modules et accessoires de comptage pour l’électricité, le gaz, l’eau… mais sans réelle cohérence. Cela nécessitait alors d’intégrer les systèmes et la gestion des données. À présent, il est possible de rapatrier en un point central du logement les index en temps des différents compteurs et sous-compteurs pour les multiples énergies et fluides consommés. Les liaisons filaires, mais aussi et surtout les échanges par radio sont alors déployés. Ces liaisons hertziennes facilitent par ailleurs l’instrumentation des locaux existants, dans la perspective de mieux connaître le comportement énergétique du bâtiment. Avec un minimum de recul, un tel sous-comptage permet par exemple de mieux allouer des budgets de rénovation énergétique.

Partage de données
Concentrer toutes les données de comptage constitue un tremplin vers le partage à distance. Un partage dans le cadre du futur maillage intelligent des réseaux électriques (smart grid), avec un gestionnaire de parc (logements collectifs, logements sociaux) ou, plus simplement, avec une interface fixe et/ou mobile de l’occupant pour lui indiquer toute anomalie telle que surconsommation, fuite d’eau…
Le comptage des fluides, la gestion des données et leur partage entrent totalement dans le spectre de la domotique pour ce qui concerne l’habitat. Une infrastructure domotique existante ne demande que l’ajout de capteurs de mesure et d’un peu de « logiciel » pour profiter des interfaces de communication disponibles et pourquoi pas, à terme, dans un contexte de smart grid opérationnel, pour gérer des fonctions de délestage.


Michel Laurent

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